Kamel Daoud : Quand ce ne sont pas les prix qui vous poursuivent, mais les femmes

L’écrivain franco-algérien Kamel Daoud se retrouve au cœur d’une nouvelle tourmente judiciaire, menaçant potentiellement sa participation au prestigieux festival littéraire La Milanesiana, prévu à Milan. En cause : un mandat d’arrêt international émis par les autorités algériennes, suite à une plainte pour exploitation non autorisée de l’histoire personnelle d’une survivante du terrorisme.

Selon Me Fatma-Zohra Benbraham, avocate de la plaignante Saâda Arban, cette dernière accuse Daoud d’avoir utilisé, sans consentement, des éléments intimes de sa vie dans son roman Les Houris. Plus grave encore, l’avocate affirme que l’épouse actuelle de l’écrivain, psychiatre de profession, aurait enfreint le secret médical en transmettant ces détails à son mari, constituant ainsi une double transgression : déontologique et littéraire.

Des sources médiatiques indiquent que Daoud envisagerait de renoncer à sa participation au festival, craignant une arrestation en Italie sur la base d’accords bilatéraux ou internationaux de coopération judiciaire.

Mais cette affaire relance surtout une question plus vaste : ces accusations successives terniront-elles l’image de Kamel Daoud, longtemps perçu comme une figure progressiste défendant les droits des femmes dans les sociétés arabo-musulmanes ?

Trois femmes au centre de la tempête
Ce qui frappe dans cette affaire, c’est la présence de trois femmes clés : Saâda Arban, la supposée victime ; l’ex-épouse de Daoud, qui l’avait accusé de violences conjugales en 2021 – une affaire qui s’était soldée par une condamnation à un an de prison ferme et une amende de 20 000 dinars algériens ; et enfin, son actuelle épouse, citée dans cette nouvelle plainte.

Depuis plusieurs années, Kamel Daoud bénéficie d’une grande attention dans les cercles culturels européens, souvent présenté comme la voix libérale venue du Sud, critique de la religion et ardent défenseur des libertés individuelles. Ses tribunes controversées ont contribué à sa notoriété internationale, lui ouvrant les portes de prestigieuses distinctions.

Cependant, à la lumière de ces affaires récurrentes, une interrogation s’impose : les institutions occidentales ont-elles rigoureusement évalué les profils qu’elles promeuvent comme représentants de « l’Autre » ? Ou bien ont-elles sacrifié la complexité contextuelle au profit d’un discours critique façonné selon leurs attentes ?

Rappelons que le festival La Milanesiana, prévu du 19 avril au 28 juillet 2025, se déroule dans plus de 20 villes italiennes. Placé cette année sous le thème : « L’intelligence – l’âme du monde et la vertu à cultiver », il accueillera plus de 150 invités internationaux, parmi lesquels des lauréats des prix Nobel, Oscar, Booker et Pulitzer, dans une programmation mêlant littérature, musique, art, science et philosophie.

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